Sortir du silence : impacts du coming out dans les métiers de la musique

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Le 11 octobre marque la Journée internationale du coming out. L’occasion pour la SMACEM d’analyser, en collaboration avec l’association Le Refuge, les enjeux de santé liés à cette annonce volontaire d’une identité de genre ou d’une orientation sexuelle. Stress, bien-être, accès aux soins, les répercussions sur la santé mentale et physique des personnes sont nombreuses, y compris dans les métiers culturels où le sujet reste encore tabou.

Affirmer une identité de genre ou une orientation sexuelle différente des normes établies suscite bon nombre de répercussions pour les personnes LGBT+. D’autant que le choix de le révéler, ou non, implique des effets sur la santé qui n’ont rien d’anodin. Et cela vaut tant dans la société en général que dans le monde de la culture.

Le coming out du point de vue d’une artiste

La situation vécue par la chanteuse Hoshi résonne encore lourdement. L’épisode remonte à 2020 aux Victoires de la musique. La chanteuse interprète alors son titre Amour censure, hymne de la lutte contre l’homophobie, avant de terminer sa performance par un baiser avec une femme. À l’issue de sa prestation, des vagues de violences et de cyberharcèlement lesbophobe déferlent sur l’artiste et dureront plusieurs années. L’angoisse monte au point qu’Hoshi finit par craindre de monter sur scène.

En 2023, elle témoigne au micro de Mouloud Achour : « Je reçois encore effectivement des messages de menaces de mort […] ça n’a pas changé depuis trois ans. Dès que je fais une télé, dès que j’apparais, ça recommence. Ma santé en a pris un coup vraiment, psychologiquement j’ai été très mal pendant longtemps. J’ai perdu dix kilos depuis les Victoires, je dors mal. J’ai la maladie de Ménière, ça me crée des vertiges très violents, je vomis, je ne peux pas me lever de mon lit, j’ai perdu de l’audition et tout ça empire à cause du stress et ce stress des réseaux sociaux, des menaces que je reçois déclenche encore plus de crises. J’ai eu envie de tout arrêter plusieurs fois durant la tournée, j’avais plus envie d’aller sur scène, plus envie de sourire, plus envie d’aller bien. »

Les risques sont ainsi exacerbés pour les personnalités publiques. Hoshi a directement subi les impacts de ces violences sur sa santé. Mais ces risques sont aussi observés à plus grande échelle.

Historique de la santé des personnes LGBT+

Une étude canadienne de 2002 s’est intéressée à la relation des personnes LGBT+ avec le système de santé. Elle démontre comment le regard porté par les institutions a profondément influencé la manière dont les personnes LGBT+ vivent leur relation avec les professionnel·les de santé. Pour cause : les personnes LGBT+ ont longtemps été considérées comme « malades » et ont, ainsi, été confrontées à des pratiques violentes physiquement et psychologiquement. L’OMS n’a, en effet, rayé l’homosexualité de sa liste des maladies mentales qu’en 1990, et la transidentité qu’en 2019.

De nos jours, la situation a bien sûr évolué. À l’inverse, la médecine adopte une posture « neutre », qui peut parfois paradoxalement compromettre une prise en charge des besoins spécifiques des personnes LGBT.

L’étude a également mis en lumière le sentiment de responsabilité éprouvé par les personnes ayant fait leur coming out. À ce titre, les personnalités publiques sont particulièrement exposées puisque souvent considérées comme des porte-parole d’un mouvement. Révéler leur sexualité ou leur identité de genre a donc forcément un impact sur leur carrière.

Pourquoi faire son coming out ?

« On sort du placard, pour reprendre l’image qu’utilisent nos voisins anglosaxons « coming out of the closet », on ne se cache plus parce qu’on n’a plus envie de se cacher, comme l’explique Geneviève, psychologue au sein de l’association Le Refuge. Ça ne devrait pas être un concept mais ç’en est un parce qu’une partie de la société est hostile aux personnes qui ont une orientation sexuelle ou une identité de genre différente de ce qui est considéré comme dans la norme. Pour certaines personnes, le coming out passe inaperçu ; pour d’autres, il déclenche des réactions parfois difficiles de la part de l’entourage. »

Les personnes qui ne sont pas « out » doivent en permanence cacher une partie de leur identité et cela peut-être très lourd à porter. « Dans ces conditions, ce n’est pas possible de vivre sa réalité. » précise Geneviève. Ce secret se répercute sur la santé et peut entraîner des troubles dépressifs mais aussi un sentiment d’oppression.

L’étude citée ci-dessus développe cette idée : elle explique que ne pas faire son coming out entraîne une faible estime de soi, un isolement social et du stress, ce qui provoque des risques plus élevés de problèmes de santé mentale, d’addictions et de pensées suicidaires. La santé physique n’est pas épargnée puisque, à titre d’exemple, les hommes qui ne sont pas out sont plus susceptibles de développer des maladies telles que le cancer. Ceci peut être lié à l’évitement médical lié à la peur du jugement. Les personnes qui ne sont pas out auprès de leurs soignant·es ont tendance à repousser les examens de routine, voire à y renoncer totalement.

Ainsi, ne pas être out a des répercussions directes sur la santé des personnes. Ces répercussions sont liées au mal-être qui résulte du fait de ne pas pouvoir être entièrement soi librement d’une part et à l’absence de suivi médical d’autre part.

L’impact du coming out sur la santé

Il y a autant de coming out que de personnes, il est donc difficile de résumer les expériences individuelles de chacun et chacune. Il s’agit donc ici d’observer les possibles impacts et réactions liées aux coming out.

Le coming out est un acte « libérateur ». Comme l’évoque Geneviève, « la personne va se sentir libérée mais ça peut aussi être une source de remise en question en fonction de la réaction des proches ». Si l’annonce n’est pas acceptée, l’état psychologique risque de se dégrader. Geneviève précise que l’environnement familial peut aussi favoriser le développement d’un sentiment de culpabilité lié à la religion et aux traditions de la famille par exemple.

Le fait d’être ouvertement « out » peut également exposer à des violences qui auront forcément un impact sur la santé. En 2024, l’association SOS homophobie recensait 1 620 cas de discriminations et violences à l’égard de personnes homosexuelles ou transgenres en France. Dans 200 de ces cas, les violences avaient lieu au sein des familles.

En ce qui concerne l’accès aux soins, être « out » permet de recevoir des soins et un suivi plus adaptés. La prise en charge est encore meilleure lorsque le ou la soignant·e pose la question de la sexualité et/ou du genre à ses patient·es. Cette information peut être importante notamment dans le suivi des maladies sexuellement transmissibles puisque leur transmission est dépendante des pratiques de chacun et chacune. Les soignant·es, en ayant cette information peuvent également donner une attention particulière à la santé mentale de leurs patient·es

L’étude canadienne citée ci-dessus est arrivée à la conclusion suivante : pour être en bonne santé dans sa définition la plus englobante, il faut avoir confiance en soi et une acceptation globale de qui l’on est, du soutien de ses proches, connaître ses besoins et pouvoir les satisfaire et surtout, se sentir et être en sécurité. Ici alors, le sentiment libérateur du coming out prend tout son effet.

Accueillir avec bienveillance le coming out

Comme expliqué, le coming out peut être une source de stress pour une personne qui ne sait pas comment ses proches vont réagir. Geneviève conseille d’utiliser une « écoute active, c’est-à-dire écouter la personne, la laisser s’exprimer sans jugement ni remarque ». En d’autres termes, cette écoute peut se présenter en quelques étapes telles que :

  • remercier la personne de vous faire confiance,
  • demander comme elle se sent et si elle a besoin que vous vous renseignez davantage sur certains sujets, s’il y a un vocabulaire en particulier à connaître,
  • voir avec elle si elle souhaite que vous partagiez cette information à d’autres personnes ou non,
  • lui rappeler que vous l’aimez.

Pour plus de détails, consultez les 10 conseils pour les parents rédigés par Dannielle Owens-Reid et Kristin Russo. Ces conseils s’adressent en particulier aux parents de jeunes mais certains peuvent également s’appliquer pour les proches de manière générale.

Bon à savoir

De nombreuses associations accompagnent les personnes LGBT+ et leurs proches.

  • Numéros d’écoute : SOS Homophobie – 01 48 06 42 41 et le Refuge – 06 31 59 69 50.
  • Prise en charge psychologique : Psy·gay·e·s.
  • Accompagnement des personnes transgenres : Acceptess-T.

À noter également : la SMACEM propose un forfait sur les consultations avec des psychologues, ainsi qu’une assistance d’écoute et de conseil 24h/24 et 7j/7 (numéro au dos de votre carte mutualiste).

De plus, la SMACEM, dans le cadre de son partenariat avec le dispositif French V.I.P qui, chaque année, valorise le catalogue de trois éditeurs et éditrices, soutient une soirée concert French V.I.P x Le Refuge. Votre mutuelle offre des places à ses adhérents et adhérentes pour cette soirée exceptionnelle qui met à l’honneur des artistes queers et/ou allié.e.s le jeudi 13 novembre à Paris.

Pour aller plus loin :

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