Le sport : quels bénéfices pour les musiciens et les musiciennes ?

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La santé, ce n’est pas seulement guérir les maux. C’est aussi les prévenir. Pour ce faire, le sport est un allié ! Maureen Bondja-Yimgna, professeure de yoga et kinésithérapeute spécialisée dans l’intervention auprès de pros de la musique, répond à la SMACEM. Elle nous explique le lien intrinsèque entre sport et musique, comment le sport profite aux musiciens et musiciennes et la place du corps dans tout cela.

Quel lien faites-vous entre le sport et la santé ?

Le lien, c’est l’individu, la personne qui vit son corps au quotidien et qui essaye d’en prendre soin. Et pour en prendre soin, il faut apprendre à le connaître, soit par une activité visant le bien-être, comme le yoga par exemple, soit par la rééducation dans le cadre d‘une consultation de kinésithérapie. Ce sont des moments où les personnes se focalisent sur leur corps et apprennent à l’amadouer. Le corps, les émotions, le rythme et les circonstances de vie peuvent amener un individu à ressentir un besoin corporel de recourir à une activité qui vient nourrir un appétit pour du bien-être.

La personne qui fait du yoga l’a choisi. La personne qu’on reçoit en consultation choisit de se soigner. Dans les deux cas, c’est l’occasion de prendre soin de soi et c’est cela, selon moi, le dénominateur commun.

Maureen Bondja-Yimgna, professeure de yoga et kinésithérapeute spécialisée dans la musique

Maureen Bondja-Yimgna a commencé sa carrière en tant que professeure de yoga. Puis, souhaitant diversifier ses compétences, elle s’est tournée vers la kinésithérapie. Formée à cette discipline depuis cinq ans, elle s’est rapidement spécialisée dans deux domaines :

  • L’approche globaliste qui permet une prise en charge globale d’une problématique en apparence localisée. Pour un motif précis elle procède à une analyse globale de la posture et du geste à l’échelle du corps entier.

« À la racine, il y a mon expérience de professeure de yoga qui me tient à cœur, nous confie-t-elle. Puis vient le tronc, ma formation de kinésithérapeute et les branches qui sont mes différentes spécialités. »

D’après votre expérience de thérapeute auprès de pros du secteur musical, quels sont les points communs entre la pratique d’une activité physique et la pratique de la musique ?

Le lien est évident et tient en 5 lettres : c’est le corps. Le corps est non seulement le support et l’instrument dans la pratique de la musique mais aussi le support et instrument d’une activité physique. Dans les deux cas, le support est le même, bien que la finalité semble différente. Le corps permet de produire une performance artistique ou une performance sportive mais il s’agit bien d’une performance « physique ».

En tant que thérapeute, j’agis pour réduire la barrière entre le monde du sport et le monde de la musique. Il s’agit de sensibiliser au fait que la santé du corps est bénéfique pour une expérience artistique saine et confortable.

C’est quelque chose qui est assez évident dans le monde de la danse car cette discipline implique le corps dans sa globalité. Dans le monde de la musique, la conscience et la sensibilité au corps dans son entièreté  est moins évidente car les musiciens et les musiciennes sont davantage focalisés sur les parties du corps qui effectuent le geste sur l’instrument (par exemple les mains), peut-être car la finalité se veut artistique et non physique. De la même façon, j’ai reçu des peintres qui n’imaginaient pas prendre soin de leur corps entier puisque leur énergie était focalisée sur leurs mains et mobilisée pour une finalité artistique.

Le corps est comme un instrument de musique qui a plein de caractéristiques, de dimensions, et ces dimensions sont au service de la performance artistique. Le geste musical est un geste qui implique le corps dans sa globalité. C’est la rencontre entre un instrument de musique et l’instrument « corps ».

Le soin à porter à l’instrument de musique relève de l’évidence et aucune partie de l’instrument ne saurait être négligée. C’est une globalité qui appelle du soin, de l’entretien et des réglages et ajustements permanents.

Tel un luthier du corps, j’œuvre en médiatrice entre l’instrument « corps » et l’instrument de musique.

Quel peuvent être les impacts de la pratique musicale sur le corps ?

Jouer d’un instrument, c’est avant tout tenir une posture, souvent assis ou debout. Corporellement, on est engagé dans cette posture pour un temps long. Or tenir ce type de posture dans le temps requiert un effort.

A cela, il faut ajouter le geste instrumental en lui-même. C’est tout le système musculosquelettique que l’on sollicite. Cela induit un engagement total multidimensionnel : neurologique (concentration, contrôle moteur), mais aussi métabolique et musculosquelettique. Il s’agit d’une sollicitation globale qui peut être contraignante. De plus, ce sont aussi des gestes répétitifs auxquels les muscles et les articulations doivent s’adapter.

Le corps a les ressources pour accomplir ces gestes mais il doit pouvoir s’adapter à ces contraintes biomécaniques imposées par la pratique de l’instrument.

Quels sont les types de troubles que vous observez chez vos patients et patientes qui travaillent dans le secteur musical ?

Il s’agit le plus souvent de troubles musculosquelettiques (TMS). Ce sont des douleurs liées à la posture de jeu (qui doit être tenue dans le temps) mais aussi aux gestes répétitifs qui imposent trop de contraintes au système musculosquelettique. Ces troubles relèvent donc souvent d’une inadéquation entre les contraintes de la pratique musicale et la tolérance du corps.

Typiquement, les musiciens et musiciennes ont souvent des tendinopathies (plus souvent connues sous le terme de « tendinites »). Il y a aussi des syndromes de surmenage : ce ne sont pas tout à fait des tendinopathies mais tout de même le résultat d’une fatigue musculaire. Enfin, comme évoqué précédemment, les troubles, douleurs et inconforts liées à la posture de jeu.

Comment la pratique d’une activité physique peut-elle prévenir ou soulager les impacts liés à une activité musicale ?

Si à côté de sa pratique instrumentale, le musicien ou la musicienne investit une activité corporelle dans laquelle son corps est soumis à des contraintes, cela aura des bénéfices. Ce que son corps aura construit, consolidé, exploré et expérimenté via le sport va forcément se transférer dans l’activité musicale. En effet, c’est le même corps qui est en jeu, dans les deux activités, ce sont les mêmes articulations, les mêmes muscles, etc. Par exemple, ce sera la même épaule qui sera sollicitée via le sport et via le jeu à l’instrument.

L’avantage, c’est que le sport défocalise de la pratique instrumentale. C’est donc encore plus intéressant parce que le sport permet aux musiciens et aux musiciennes d’expérimenter leur corps dans d’autres situations et de façon plus globale que la pratique instrumentale (qui demande un geste précis). Les musiciens et musiciennes que je vois en consultation et qui ont une activité physique à côté me confirment les bénéfices que cela leur apporte.

Quel que soit le sport pratiqué, le but est de mettre le corps en mouvement. J’ajouterais que le plaisir est essentiel : il permet aux personnes d’avoir la motivation de pratiquer un sport. Il est donc important de trouver l’activité physique qui vous convient.

Pensez-vous que la pratique d’une activité physique puisse avoir d’autres bénéfices pour les professionnel·les de la musique ?

Tant du point de vue de la science que des patients et patientes que nous recevons, nous savons que l’activité physique a de nombreux bénéfices pour le bien-être physique et mental en général. Rappelons que le mental fait partie du corps !

De la même façon que la pratique d’un instrument de musique, quand l’activité physique est faite par plaisir, elle est également bénéfique pour la santé mentale.

À partir du moment où vous pratiquez une activité physique qui vous mobilise physiquement, neurologiquement, émotionnellement etc., vous êtes aussi moins dans vos pensées. Que vous soyez en train de dribbler ou de ramer, cela vous oblige à être dans l’instant présent et, naturellement, le cerveau se met en pause.

Le sport : quels bénéfices et quelles recommandations ?

Le sport a de nombreux bienfaits ! C’est un vecteur de santé qui se concrétise de plusieurs manières :

  • réduction des risques de maladies cardio-vasculaires,
  • amélioration du fonctionnement des muscles respiratoires,
  • amélioration de la masse osseuse,
  • baisse de la prévalence de certains cancers (notamment du sein et du colon),
  • meilleur équilibre psychologique,
  • prévention du vieillissement physiologique.

Au-delà de ces caractéristiques, le sport est aussi un moyen de lutter contre l’isolement puisqu’il permet la création de lien social.

Les recommandations

  • 150 minutes d’activité d’intensité modérée ou au moins 75 minutes d’activité d’intensité soutenue ou une combinaison des deux,
  • Une pratique par période de 10 minutes au moins,
  • Du renforcement musculaire au moins deux jours par semaine.

Cela peut se concrétiser par 30 minutes de marche rapide par jour, 5 jours par semaine ou 25 minutes de course 3 jours par semaine. A chacun et chacune de trouver l’activité et le rythme qui lui convient !

Avez-vous des conseils pour intégrer la pratique d’une activité sportive dans le quotidien, notamment lorsque l’on a des horaires décalés ?

Absolument, on peut prendre exemple sur la pratique instrumentale. Pour les musiciens et musiciennes, c’est une évidence : il faut une régularité quand on pratique un instrument. Ainsi, le conseil que je donne c’est d’essayer de prendre 5 minutes. On commence petit, ce n’est pas la peine de commencer par se donner des gros objectifs, déjà 5 minutes, voire 10 minutes, par jour pour faire quelques mouvements de mobilité, de renforcement musculaire, de cardio. Il s’agit de choses simples, comme des exercices de mobilités globales du dos, des squats, des fentes, afin de nourrir son instrument corporel dans toutes ses dimensions. C’est quelque chose qui fait partie de l’hygiène de vie, au même niveau que la nutrition, le sommeil, etc. . C’est pourquoi je recommande de prendre ces quelques minutes quotidiennes et de se créer une routine.

L’idéal est aussi d’avoir une journée où l’on investit une activité corporelle de manière plus approfondie, pendant 30 minutes ou 1 heure. On peut aussi repérer les moments dans le quotidien pour se mettre en mouvement comme utiliser plutôt les escaliers ou marcher une station de métro en plus.

Enfin, le secret, c’est que le corps va naturellement appeler à plus. Il va prendre le dessus, comme c’est le cas pour les autres besoins physiologiques. En mettant en place une routine, nous allons le sentir en quelques semaines et nous allons créer un besoin.

En fait, on a aujourd’hui des modes de vie très évolués et sophistiqués, mais notre physiologie n’a pas tellement changé. Nous sommes toujours les chasseurs-cueilleurs d’antan. On a un besoin de nourrir cette dimension de mouvement et d’effort physique.

Bon à savoir !

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